British Blues Boom : Quand le son de l'Amérique a façonné le British Blues
Alexis Korner et Cyril Davies sont souvent considérés comme les pères fondateurs du British Blues, et leur rôle a été absolument crucial dans le lancement de ce mouvement.
● Alexis Korner (1928-1984) : Le Catalyseur et le Mentor
Avant eux, le blues était surtout relégué au second plan, souvent joué dans le cadre du mouvement skiffle ou par des musiciens de jazz. Korner et Davies ont été parmi les premiers à adopter le blues électrique, avec des sonorités plus proches de celles du blues de Chicago.
En 1961, Korner fonde les Blues Incorporated, considérés comme la première formation de blues électrique en Grande-Bretagne. Plus qu'un simple groupe, c'était une véritable pépinière de talents. La liste des musiciens qui y ont joué est impressionnante et témoigne de leur rôle de tremplin :
- Charlie Watts et Jack Bruce (futurs membres des Rolling Stones et de Cream)
- Long John Baldry
- Graham Bond
- Ginger Baker (futur membre de Cream)
- Et bien d'autres !
Korner était un fervent promoteur du blues américain. Il partageait ses connaissances et encourageait les jeunes musiciens à explorer cette musique. Il était un mentor, un véritable "parrain" pour beaucoup.
Avec Cyril Davies, il a cofondé le Ealing Jazz Club en mars 1962, qui est rapidement devenu le Ealing Blues Club. Ce lieu mythique a servi de tremplin où de nombreux futurs grands noms du British Blues ont fait leurs premières armes ou assisté à des concerts fondateurs.
● Cyril Davies (1932-1964) : Le Puriste et l'Harmoniciste
Contrairement à Korner, plus ouvert à l'expérimentation et à l'incorporation d'éléments de R&B et de jazz, Cyril Davies était un puriste. Il était passionné par le blues brut et authentique, en particulier le Chicago blues et ses grands harmonicistes comme Little Walter. Cette divergence de vision a d'ailleurs mené à leur séparation et à la création du propre groupe de Davies, les Cyril Davies All-Stars.
Davies était un harmoniciste exceptionnel, dont le jeu était très respecté par ses pairs et a influencé de nombreux musiciens. Son rôle aux côtés de Korner dans la création du Ealing Blues Club est essentiel pour comprendre l'émergence de la scène.
▪︎ Leur héritage commun
En ouvrant des clubs dédiés et en formant des groupes comme les Blues Incorporated, Korner et Davies ont créé l'environnement nécessaire pour que le blues électrique prenne racine en Grande-Bretagne. Ils ont offert une plateforme indispensable à toute une génération de jeunes musiciens.
Leur influence sur des groupes comme les Rolling Stones et les Yardbirds est indéniable : les futurs membres des Rolling Stones (Mick Jagger, Keith Richards, Brian Jones, Charlie Watts) ont tous fréquenté le Ealing Blues Club et ont été profondément influencés par les Blues Incorporated. Les Yardbirds, et bien d'autres, ont également baigné dans cette atmosphère.
Ils ont joué un rôle clé dans la transition des musiciens britanniques du skiffle et du jazz vers le blues électrique amplifié, qui allait devenir le fondement du rock britannique.
En somme, Alexis Korner et Cyril Davies n'ont peut-être pas connu le succès commercial retentissant de certains de leurs "élèves", mais ils ont posé les pierres angulaires sur lesquelles le British Blues Boom s'est bâti. Sans leur passion, leur vision et leur rôle de catalyseur, le paysage musical britannique des années 60 aurait été très différent.
Les clubs ont été des catalyseurs fondamentaux pour l'éclosion et la diffusion du British Blues Boom. Plus qu'une simple scène, ils étaient de véritables lieux de rencontre, d'apprentissage et d'expérimentation.
● Le Ealing Jazz Club : Le véritable berceau du British Blues
Avant le Marquee, il est crucial de revenir sur le Ealing Jazz Club, cofondé par Alexis Korner et Cyril Davies en mars 1962. C'est le point de départ pour une génération entière de musiciens.
Ce club offrait un espace où les musiciens pouvaient se familiariser avec le blues électrique, souvent en improvisant ensemble.
Des figures comme Mick Jagger, Keith Richards, Brian Jones, Eric Clapton, Jeff Beck, etJimmy Page y ont écouté, traîné et joué. Les Rolling Stones y ont même tenu leurs premières répétitions et concerts, posant les bases de leur son.
L'ambiance et les performances du Ealing Club ont directement inspiré la formation de nombreux groupes emblématiques.
● Le Blues and Barrelhouse Club : L'initiation et le partage
Ce club, également dirigé par des passionnés (dont Alexis Korner et Neil Slaven), a joué un rôle important avant que le grand boom ne prenne son essor, en particulier à la fin des années 50 et au tout début des années 60.
Il a permis de faire découvrir le blues sous ses diverses formes aux jeunes musiciens britanniques, avant que le blues électrique ne domine la scène.
Plus qu'un lieu de concerts établis, c'était un espace d'étude et de jam sessions où les musiciens s'immergeaient dans la musique, écoutaient des disques rares et apprenaient les uns des autres.
● Le Marquee Club : Le tremplin vers la reconnaissance
Le Marquee, en particulier à partir de 1962-1963, est devenu un club mythique pour le British Blues et bien au-delà.
Anciennement un club de jazz, il a rapidement embrassé la scène R&B et blues en programmant régulièrement des groupes, leur offrant une visibilité cruciale.
Des groupes comme les Rolling Stones, les Yardbirds, The Who et Cream y ont donné des concerts mémorables, construisant leur réputation. C'était un passage obligé pour tout groupe qui voulait percer.
Le Marquee attirait un public jeune et passionné, créant une ambiance électrique. Contrairement à des lieux plus informels comme le Ealing, le Marquee offrait une scène plus professionnelle avec une meilleure sonorisation, aidant ainsi les groupes à passer à l'étape supérieure.
> L'impact de ces clubs s'étend bien au-delà de leur simple existence.
- Ils ont fourni aux musiciens des lieux pour répéter, se produire en public et développer leur son.
- Ils ont exposé le blues à un public plus large, suscitant l'intérêt et l'engouement qui ont alimenté le mouvement.
- C'est dans ces lieux que les musiciens se rencontraient, formaient des groupes, échangeaient des idées et s'influençaient mutuellement, une compétition saine qui a stimulé leur créativité.
- Ils ont permis aux groupes de construire une base de fans fidèles avant même de pouvoir enregistrer des disques.
- En jouant régulièrement, les musiciens affinaient leur répertoire, adaptaient les standards du blues américain à leur propre style et commençaient à écrire leurs propres compositions.
En somme, sans ces clubs, le British Blues Boom n'aurait tout simplement pas eu l'espace pour grandir et s'épanouir. Ils étaient le terreau fertile de cette révolution musicale.
● Les labels : Du club au marché international
Les clubs ont été le terreau fertile et les musiciens les graines, mais sans les labels discographiques, le British Blues Boom n'aurait jamais pu s'épanouir au-delà de la scène locale et conquérir le monde.
Au début, de nombreuses grandes maisons de disques se montraient sceptiques face à ce nouveau son "brut", préférant une pop plus édulcorée. Cependant, face à la popularité grandissante des groupes dans les clubs et à leur potentiel commercial (particulièrement après le succès des Beatles), elles ont commencé à prendre des risques.
Decca Records a été l'un des premiers à miser sur les Rolling Stones, leur offrant un contrat après que Columbia (EMI) les a refusés. C'est Decca qui a distribué leurs premiers albums, essentiels pour populariser le blues teinté de rock. Le label a également produit des disques des Yardbirds.
Progressivement, d'autres majors comme EMI (avec des sous-labels comme Columbia ou Parlophone) ont suivi, et des labels comme Pye ou Philips/Fontana ont aussi accueilli des artistes liés au R&B et au blues. Ces majors avaient la puissance de distribution nécessaire pour faire passer le British Blues des clubs aux foyers, via la radio et les disquaires.
En parallèle, l'émergence de labels plus petits et spécialisés a été cruciale. Plus proches des puristes du blues, ils étaient prêts à prendre des risques artistiques.
Le label Blue Horizon, fondé par l'expert et collectionneur de blues américain Mike Vernon en 1965, en est un exemple emblématique. Vernon a créé ce label spécifiquement pour enregistrer des artistes du British Blues et parfois même des bluesmen américains de passage. Les premiers albums de Peter Green's Fleetwood Mac sont sortis chez Blue Horizon, ce qui convenait parfaitement à leur son blues authentique. Ces labels ont offert une plateforme à des groupes qui ne rentraient pas forcément dans le moule commercial des grandes majors, permettant l'enregistrement d'un blues plus "roots".
Les labels ont permis de capturer le son de ces groupes, souvent en direct ou avec une approche minimaliste pour préserver leur énergie brute. Les premiers albums des Rolling Stones, par exemple, sont connus pour leur son "sale" et authentique, qui contrastait avec les productions plus polies de l'époque. Ils ont aussi organisé des sessions d'enregistrement qui ont donné lieu à des albums emblématiques, comme le célèbre "Beano album" de John Mayall avec Eric Clapton pour Decca.
De plus, les producteurs et ingénieurs du son ont aidé à façonner le son des disques, tout en laissant souvent une grande liberté aux musiciens. Leurs équipes marketing ont ensuite travaillé à la promotion de ces groupes, créant des images iconiques — l'attitude rebelle des Stones, le mystère de Peter Green — qui ont amplifié leur impact bien au-delà de la musique.
Sans la capacité des labels à enregistrer, distribuer et promouvoir cette musique, le British Blues Boom serait resté un phénomène de niche. Ils ont été le pont entre la passion des musiciens et le grand public, assurant ainsi la survie et l'influence durable du mouvement.
Des figures comme John Mayall et Stan Webb illustrent parfaitement l'importance des clubs dans l'éclosion de la scène British Blues. Sans ce terreau fertile, il est fort probable que ces artistes n'auraient jamais atteint le statut qu'ils ont eu, et l'impact de leur travail sur le genre n'aurait pas été le même.
● John Mayall (né en 1933-2024) : Le "parrain du British Blues"
Après Alexis Korner, John Mayall est sans doute la figure la plus emblématique en tant que mentor et formateur de talents.
Son groupe, John Mayall & The Bluesbreakers, est une véritable institution et une pépinière de talents inégalée. Fasciné par l'authenticité du blues américain, Mayall a su attirer et former certains des plus grands guitaristes de l'histoire du rock. Leurs passages répétés dans les clubs ont été cruciaux pour leur développement et leur visibilité.
● Les célèbres guitaristes passés par ses rangs :
▪︎ Eric Clapton : C'est avec les Bluesbreakers qu'il a développé son style incendiaire et enregistré l'album mythique "Blues Breakers with Eric Clapton" (surnommé le "Beano album"), qui a eu un impact retentissant.
▪︎ Peter Green : Après le départ de Clapton, Green a repris le flambeau, créant un son unique et posant les bases de Fleetwood Mac.
▪︎ Mick Taylor : Avant de rejoindre les Rolling Stones, Taylor a également fait ses classes aux côtés de Mayall.
Mayall n'a pas seulement lancé des carrières ; il a maintenu la flamme du blues vivante et l'a fait évoluer en explorant de multiples facettes du genre tout au long de sa carrière. Son approche a toujours été pédagogique, montrant comment le blues pouvait servir de fondation pour des explorations musicales variées, tout en puisant son inspiration directement auprès des grands bluesmen américains.
● Stan Webb (né en 1946) : Figure de la deuxième vague
Stan Webb et son groupe Chicken Shack représentent une autre facette du British Blues. Bien que leur succès soit légèrement plus tardif que celui de la période Clapton des Bluesbreakers, leur carrière est tout aussi ancrée dans l'héritage des clubs.
Chicken Shack jouait un blues plus direct, souvent influencé par des artistes comme Freddie King. Leur énergie sur scène faisait mouche dans les clubs et les festivals naissants, où ils étaient des habitués.
C'est au sein de Chicken Shack que Christine Perfect (future Christine McVie de Fleetwood Mac) a commencé sa carrière en tant que pianiste et chanteuse. Sa voix distinctive et son jeu de piano étaient des éléments clés du son du groupe.
Comme beaucoup d'autres formations de l'époque, Chicken Shack a bâti sa réputation grâce à ses performances live sur le circuit des clubs. C'est là qu'ils ont affiné leur son et gagné leur public avant de connaître un succès commercial plus large avec des titres comme "I'd Rather Go Blind".
● Peter Green (1946-2020) : Le génie tourmenté du blues britannique
Le succès colossal de Fleetwood Mac dans les années 70, avec un son plus pop-rock, a souvent éclipsé leurs débuts. Pourtant, les racines du groupe sont profondément ancrées dans le British Blues.
Comme nous l'avons déjà mentionné, Peter Green a succédé à Eric Clapton au sein de John Mayall & The Bluesbreakers. Cette période a été fondamentale pour le jeune guitariste.
Non seulement il a réussi à relever le défi de remplacer Clapton, mais il a aussi apporté sa propre touche : un son de guitare expressif, mélancolique et un vibrato distinctif qui est devenu sa marque de fabrique. Son jeu était d'une profondeur émotionnelle rare.
Fort de cette expérience et de la reconnaissance qu'il a acquise chez Mayall, Peter Green a formé Fleetwood Mac avec l'aide de Mick Fleetwood (batteur) et John McVie (bassiste), tous deux également d'anciens Bluesbreakers, ainsi que Jeremy Spencer (guitariste).
Les premiers albums du groupe, comme l'éponyme "Fleetwood Mac" (1968), "Mr. Wonderful" (1968) et "Then Play On" (1969), sont des classiques incontournables du British Blues. Ils incluent des compositions originales de Green comme "Oh Well", "Black Magic Woman" (popularisée plus tard par Santana) et "Albatross" (un instrumental qui fut un succès immense au Royaume-Uni), en plus de reprises de standards du blues.
Le son de ces albums était lourd, sombre et souvent hypnotique, avec la guitare de Green au centre de toutes les attentions.
Christine Perfect (future Christine McVie), que nous avons vue avec Chicken Shack, a par la suite rejoint le groupe, contribuant à cette période blues en tant que pianiste et chanteuse.
● Un héritage souvent oublié
Sous la houlette de Green, les débuts de Fleetwood Mac sont l'une des expressions les plus pures et les plus réussies du British Blues. Le groupe a démontré que les musiciens britanniques pouvaient non seulement imiter leurs idoles américaines, mais aussi infuser le genre de leur propre sensibilité.
Le départ de Peter Green, au début des années 70, a marqué un tournant. Largement dû à des problèmes de santé mentale et à sa désillusion face à l'industrie musicale, son départ a conduit Fleetwood Mac à évoluer vers des sonorités plus pop et rock. C'est l'arrivée de Lindsey Buckingham et de Stevie Nicks qui a mené au succès planétaire d'albums comme "Rumours".
Même si le grand public associe Fleetwood Mac à des hits comme "Go Your Own Way" ou "Dreams", les puristes du blues reconnaissent l'immense contribution de Peter Green à la période fondatrice du groupe et au genre tout entier. Son influence sur des guitaristes comme Gary Moore est indéniable.
● Les Yardbirds : La quintessence du British Blues innovateur.
Les Yardbirds incarnent l'esprit pionnier du blues britannique. Plus qu'un simple groupe de blues, ils étaient un véritable laboratoire d'expérimentation, posant les bases du rock moderne et laissant une empreinte indélébile.
Ce qui rend les Yardbirds si uniques et si représentatifs de cette période, c'est d'avoir eu dans leurs rangs trois des plus grands guitaristes de l'histoire du rock. Chacun a marqué une époque distincte du groupe et a été une figure clé du British Blues :
▪︎ Eric Clapton : Le puriste ("Slowhand")
Au début de leur carrière, Eric Clapton était le guitariste des Yardbirds. Sa vision était celle d'un puriste absolu du blues, avec une dévotion presque religieuse pour les maîtres américains comme B.B. King, Freddie King ou Hubert Sumlin.
Sa quête d'authenticité l'a d'ailleurs poussé à quitter le groupe en 1965, lorsque les Yardbirds ont commencé à s'orienter vers un son plus commercial et pop (notamment avec le single "For Your Love"). Il a alors rejoint John Mayall & The Bluesbreakers, où il a pu exprimer son blues "pur" et s'élever au rang de légende.
▪︎ Jeff Beck : L'expérimentateur ("The Fuzz King")
Après le départ de Clapton, les Yardbirds ont recruté Jeff Beck. Avec lui, le groupe a pris une tout autre dimension. Beck était un innovateur sonore. Il a introduit des effets de guitare inédits pour l'époque, comme le fuzz (d'où son surnom de "Fuzz King"), la réverbération et la distorsion. Il a ainsi repoussé les limites de ce qu'une guitare électrique pouvait faire.
Sa période avec les Yardbirds (notamment sur des titres comme "Heart Full of Soul", "Shapes of Things" ou "Over Under Sideways Down") a non seulement fait progresser le blues-rock, mais a aussi directement influencé le son du rock psychédélique naissant.
● Jimmy Page : Le visionnaire ("The Architect")
Jimmy Page a d'abord rejoint les Yardbirds en tant que bassiste (pour remplacer Paul Samwell-Smith), avant de passer à la guitare aux côtés de Jeff Beck. Il est ensuite devenu le seul guitariste principal après le départ de Beck.
C'est avec Page que les Yardbirds ont commencé à explorer des structures musicales plus complexes et des sonorités plus lourdes, jetant les bases de ce qui deviendrait le hard rock et le heavy metal. Lorsque le groupe s'est essoufflé et a finalement splitté, Page a formé le groupe qui allait devenir Led Zeppelin à partir des cendres des "New Yardbirds".
● L'héritage des Yardbirds
▪︎ Un carrefour stylistique : Les Yardbirds sont un microcosme de l'évolution du British Blues vers le rock. Ils ont montré comment le respect du blues (Clapton) pouvait fusionner avec l'expérimentation sonore (Beck) et la vision d'un nouveau genre puissant (Page).
▪︎ Influence sur le rock mondial : Leur son distinctif, leur approche des solos de guitare et leur sens de l'expérimentation ont directement inspiré d'innombrables groupes des deux côtés de l'Atlantique. Ils ont prouvé que le blues n'était pas figé, mais une fondation solide sur laquelle on pouvait construire des univers sonores entièrement nouveaux.
● The Animals : Le Rhythm & Blues avec une âme de blues
Originaires de Newcastle, The Animals et leur chanteur emblématique, Eric Burdon, ont laissé une empreinte durable sur le British Blues Boom. Leur approche, légèrement différente de celle des groupes centrés sur les prouesses de guitaristes, s'est distinguée par un son brut, énergique et une capacité à injecter une profondeur émotionnelle authentique dans leurs interprétations.
▪︎ Eric Burdon : La voix unique
Eric Burdon est sans conteste l'un des chanteurs les plus distinctifs et puissants du British Invasion. Sa voix rauque, passionnée et pleine d'âme pouvait transmettre une intensité émotionnelle rare, mêlant la rudesse du blues au dynamisme du R&B. Il n'était pas un simple interprète, mais un véritable conteur qui s'appropriait chaque chanson.
Alors que d'autres groupes mettaient l'accent sur les prouesses guitaristiques, The Animals, menés par Burdon, privilégiaient l'émotion vocale et l'énergie collective.
▪︎ "The House of the Rising Sun" : L'hymne iconique
Leur version de ce vieux chant populaire américain en 1964 est devenue un succès planétaire. Ce n'est pas seulement un tube, c'est un hymne. La performance vocale de Burdon est magistrale et l'arrangement avec l'orgue d'Alan Price est sombre et lancinant, créant une atmosphère unique.
Ce titre a montré au grand public qu'un groupe britannique pouvait s'approprier une chanson traditionnelle américaine et la transformer en quelque chose de contemporain et universellement attrayant, tout en conservant son essence blues.
Au-delà de ce succès, The Animals ont enchaîné d'autres titres majeurs imprégnés de R&B et de blues, comme "Don't Let Me Be Misunderstood", "We Gotta Get Out of This Place" et "It's My Life". Ces chansons démontraient leur capacité à créer des hymnes générationnels avec une instrumentation simple mais efficace, au service de la voix de Burdon.
Profondément influencés par des artistes comme Ray Charles, John Lee Hooker ou Jimmy Reed, The Animals ont contribué à populariser le R&B dans le sillage du blues, démontrant la porosité entre ces deux genres.
● L'héritage des Animals
- Ils ont rappelé que le blues est avant tout une affaire de voix et de chant. La performance vocale de Burdon est restée une référence.
- Ils ont fusionné avec succès le blues et le rhythm & blues, élargissant le spectre sonore du British Blues Boom au-delà des seuls guitar heroes.
- Leurs chansons avaient souvent une résonance sociale et juvénile, capturant l'esprit d'une génération en quête de sens et de liberté, comme le suggère le titre "We Gotta Get Out of This Place".
Avec Eric Burdon en fer de lance, The Animals ont prouvé qu'un groupe pouvait devenir majeur en se concentrant sur la cohésion sonore et l'intensité vocale, plutôt que sur les solos de guitare flamboyants. Leur musique continue d'influencer de nombreux artistes, prouvant la puissance intemporelle de leur interprétation du blues et du R&B.
● Les Rolling Stones : Des racines ancrées dans le blues
Il est impossible de parler du British Blues Boom sans évoquer les Rolling Stones. Ils sont peut-être le groupe le plus célèbre et le plus influent à avoir émergé de cette scène, et leur lien avec le blues est à la fois profond et indéfectible.
▪︎ Des racines purement blues
Mick Jagger, Keith Richards, Brian Jones, Ian Stewart, et plus tard Charlie Watts et Bill Wyman, se sont tous rencontrés et ont fait leurs premières armes dans l'effervescence des clubs londoniens, notamment le Ealing Club et le Marquee. Ils étaient des habitués des concerts d'Alexis Korner et Cyril Davies. Keith Richards a d'ailleurs déclaré que sans Korner et Davies, "il n'y aurait peut-être eu rien".
Leur passion pour le blues américain était quasi-religieuse. Ils vénéraient des artistes comme Muddy Waters, dont ils ont tiré le nom "Rolling Stone", mais aussi Howlin' Wolf, Chuck Berry, Jimmy Reed, Bo Diddley, Elmore James et Robert Johnson. À leurs débuts, les sets des Rolling Stones étaient presque exclusivement composés de reprises de standards du blues et du R&B. Leurs premiers albums regorgent de ces interprétations, comme " I'm a King Bee" de Slim Harpo ou "Little Red Rooster" de Howlin' Wolf. Le groupe cherchait alors à reproduire au plus près le son et le feeling de leurs idoles.
● La transformation et la popularisation
Si d'autres groupes du British Blues ont conservé une approche plus "pure" du genre (comme les Bluesbreakers de Mayall), les Rolling Stones ont très vite injecté une énergie rock'n'roll et une attitude rebelle qui les ont propulsés vers le succès international. Ils ont pris le blues, l'ont électrifié, l'ont rendu plus "sale" et l'ont présenté à un public jeune et majoritairement blanc qui n'avait jamais été exposé à cette musique auparavant.
La guitare rythmique de Keith Richards (souvent en open tuning, inspirée par le blues) et ses riffs incisifs, combinés à la voix et à l'attitude scénique de Mick Jagger, ont créé un son inimitable, profondément ancré dans le blues mais avec une puissance rock indéniable.
Plus que n'importe quel autre groupe, les Rolling Stones ont servi de passerelle. En popularisant le blues, ils ont ouvert la porte à de nombreux auditeurs qui ont pu découvrir les artistes originaux. Ils ont même invité des légendes comme Howlin' Wolf à se produire à la télévision américaine, contribuant à leur donner une visibilité inédite.
● Un lien éternel
▪︎ Le blues dans leur ADN : Même au summum de leur gloire avec des hits pop-rock dans les années 70 et au-delà, les Rolling Stones n'ont jamais vraiment abandonné le blues. Il est resté la colonne vertébrale de leur musique. Des albums comme "Exile on Main St." sont gorgés de sonorités blues et gospel.
▪︎ Retour aux sources : En 2016, ils ont sorti l'album "Blue & Lonesome", entièrement composé de reprises de classiques du blues de Chicago. C'était un retour explicite et magnifique à leurs racines, prouvant que même après plus de 50 ans de carrière, leur amour pour le blues est intact.
Les Rolling Stones n'ont pas seulement joué du blues ; ils l'ont incarné, l'ont rendu accessible et sexy pour une nouvelle génération, et ont assuré sa survie et son influence massive dans le rock'n'roll.
● The Who : De l'authenticité à l'innovation
The Who, bien que souvent associé au Mod, au Power Pop, au Hard Rock ou à l'Opéra-Rock, a des racines profondes dans le Rhythm & Blues et le blues américain. Cet aspect de leurs débuts est parfois sous-estimé par rapport à leur carrière ultérieure.
Voici pourquoi The Who s'inscrit aussi, à sa manière, dans l'héritage du British Blues :
● Les premiers pas : le "Maximum R&B"
Avant de devenir les icônes que l'on connaît, les membres de The Who (initialement connus sous le nom de The Detours, puis The High Numbers) étaient, comme beaucoup de leurs pairs britanniques, des passionnés de Rhythm & Blues et de Rock'n'Roll américains. Pete Townshend, le guitariste et principal compositeur, était fortement influencé par des bluesmen comme Howlin' Wolf et John Lee Hooker, ainsi que par le R&B de James Brown. Roger Daltrey avait quant à lui une voix puissante et expressive, parfaitement adaptée au chant blues et soul.
À leurs débuts, leurs concerts étaient remplis de reprises de standards de R&B et de blues, qu'ils jouaient avec une énergie frénétique. C'est de là qu'est né leur slogan : "Maximum R&B". L'idée était de s'inspirer du R&B noir américain et d'y injecter une dose massive de puissance, de volume et d'agressivité.
Leur tout premier single, "I Can't Explain" (1965), avait en face B une reprise blues-rock intitulée "Bald Headed Woman". Bien que la face A soit déjà très "power pop", le morceau de la face B révélait clairement leurs racines. D'autres titres de leurs premières années montraient également cette influence.
L'approche de The Who, caractérisée par les "power chords" de Townshend, la basse mélodique et tonitruante de John Entwistle et la batterie explosive de Keith Moon, a donné une intensité sans précédent à ce R&B teinté de blues. Même s'ils s'éloignaient du format traditionnel, l'énergie et le feeling qu'ils y mettaient venaient directement de leurs inspirations blues et R&B.
● L'évolution et la transformation
Rapidement, Pete Townshend a commencé à écrire ses propres chansons, dont les thèmes et l'attitude s'éloignaient du blues pur pour coller davantage à la culture Mod et aux préoccupations de la jeunesse britannique. Des titres comme "My Generation" sont devenus des hymnes Mod, mais l'énergie brute et la ligne de basse dominante d'Entwistle rappellent encore l'intensité du R&B.
The Who a ensuite évolué vers des formes plus ambitieuses comme l'opéra-rock ("Tommy", "Quadrophenia"), intégrant des éléments de rock progressif et de hard rock. Le blues, même s'il n'était plus au premier plan, est resté une fondation rythmique et mélodique sous-jacente.
Un exemple notable de ce lien persistant est leur reprise de "Young Man Blues" de Mose Allison, immortalisée sur leur album live légendaire "Live at Leeds" (1970). Cette version, pleine d'une énergie furieuse, est une démonstration parfaite de la façon dont The Who pouvait prendre un standard de blues et le transformer en une explosion rock caractéristique de leur son.
En somme, The Who n'est peut-être pas un groupe "purement" blues comme l'étaient John Mayall & The Bluesbreakers. Néanmoins, leur point de départ est bel et bien ancré dans cette tradition. Ils ont pris l'essence du blues et du R&B, l'ont amplifiée, l'ont rendue plus agressive et l'ont utilisée comme tremplin pour créer leur propre son révolutionnaire qui allait définir le rock. C'est une excellente illustration de la diversité et de la dynamique du British Blues Boom.
Le succès fulgurant et international des groupes du British Blues Boom, notamment aux États-Unis, est l'un des aspects les plus fascinants de ce mouvement. Ce phénomène, communément appelé la "British Invasion", a eu un effet retentissant.
C'est un paradoxe historique incroyable : le blues est une forme d'art afro-américaine, née aux États-Unis. Pourtant, ce sont des groupes blancs britanniques qui l'ont ramené sur le devant de la scène américaine et mondiale, le rendant populaire auprès d'un public qui l'avait parfois négligé dans son propre pays.
Les adolescents américains, habitués à une pop plus légère ou à un rock'n'roll plus édulcoré, ont été électrisés par l'énergie brute, l'attitude rebelle et le son puissant des groupes britanniques. En voyant les Rolling Stones, les Animals, les Yardbirds ou John Mayall jouer du blues, de nombreux jeunes Américains (blancs et noirs) se sont mis à chercher les sources : ils ont redécouvert Muddy Waters, Howlin' Wolf, John Lee Hooker, B.B. King, et bien d'autres légendes dont la carrière a été relancée ou a connu un regain d'intérêt grâce à cette nouvelle visibilité.
Les musiciens britanniques n'ont pas simplement copié le blues américain. Ils l'ont interprété avec une énergie rock'n'roll intense, un volume plus élevé, des guitares électriques saturées et une attitude de jeunes rebelles. Ce son, à la fois plus agressif et plus commercialement viable pour le marché de la pop-rock des années 60, a fait la différence.
Des groupes comme les Rolling Stones ont incarné une image "anti-établissement" qui a séduit une jeunesse en quête de transgression, alors que de nombreux artistes de blues américains étaient perçus comme des musiciens traditionnels ou, parfois, associés à une image de souffrance.
L'arrivée des Beatles en 1964 a ouvert la porte, et les chaînes de télévision américaines étaient avides de nouvelles sensations britanniques. Des émissions comme le "Ed Sullivan Show" ont offert une plateforme immense à ces groupes. Les maisons de disques ont rapidement vu le potentiel commercial et ont massivement promu ces artistes. Les singles et albums des Rolling Stones, des Animals, des Dave Clark Five et d'autres ont inondé les ondes radio.
Ce succès fulgurant a non seulement propulsé ces groupes au rang de superstars mondiales, mais il a aussi eu un impact profond et durable sur la musique en général. Il a contribué à légitimer le blues comme une forme d'art essentielle et a jeté les bases du développement du rock, du hard rock et des genres ultérieurs.
Le British Blues Boom a joué un rôle inattendu, bien que parfois complexe, dans la chute des barrières raciales aux États-Unis, surtout au début des années 1960.
Le blues est, par essence, une musique afro-américaine, née des expériences de l'esclavage, de la ségrégation et de la résilience. Pourtant, dans les années 50 et au début des années 60, le blues "pur" des artistes noirs était souvent relégué aux stations de radio "noires" ou à un circuit de clubs ségrégué. Beaucoup de jeunes Américains blancs n'avaient que peu ou pas d'exposition à cette musique fondamentale.
C'est un aspect sous-estimé de l'impact du British Blues Boom : son rôle, même indirect, dans la prise de conscience et la mobilisation en faveur des droits civiques aux États-Unis, en particulier dans le Nord.
Avant la British Invasion, une grande partie de la jeunesse blanche américaine était peu consciente de la richesse et de la profondeur du blues original. Lorsque les Rolling Stones, les Animals et les autres ont débarqué, ils ont fait la promotion de leurs idoles du blues américain, qui étaient souvent noirs. Ils ont poussé un jeune public à se demander : "Qui sont ces artistes que mes groupes préférés vénèrent tant ? D'où vient cette musique si puissante ?"
Cette curiosité a mené de nombreux jeunes à rechercher les disques de Muddy Waters, Howlin' Wolf ou B.B. King. En écoutant ces artistes, ils ont été confrontés non seulement à une musique extraordinaire, mais aussi, et c'est crucial, à l'histoire et à l'expérience afro-américaine que cette musique incarnait.
Le blues est intrinsèquement lié à l'histoire des Afro-Américains. Il exprime la douleur, la résilience et la dignité face à l'adversité. En écoutant les paroles et l'émotion de ces chansons, de jeunes Américains blancs ont pu avoir un aperçu plus direct et authentique des réalités de la vie afro-américaine, humanisant une expérience qui était souvent stéréotypée ou ignorée.
Pour une génération en quête d'authenticité et de rébellion, le blues, avec son histoire et son lien avec une communauté opprimée, a résonné profondément. Il est devenu une bande-son pour la contestation sociale et un symbole d'une culture alternative.
Cette nouvelle appréciation culturelle a pu, pour certains, se traduire par un engagement politique. En aimant la musique, on pouvait aussi se sentir concerné par la cause de ceux qui l'avaient créée. Le British Blues Boom a donc pu servir de pont entre l'appréciation culturelle et la prise de conscience sociale pour une partie de la jeunesse blanche, qui s'est ensuite impliquée dans le mouvement des droits civiques.
L'engouement a parfois permis d'organiser des concerts où des artistes noirs originaux et des groupes britanniques se partageaient la scène, créant des espaces d'interaction culturelle qui auraient été rares quelques années auparavant dans un contexte de ségrégation.
Bien sûr, le British Blues n'était qu'un facteur parmi d'autres, et la lutte pour les droits civiques était avant tout menée par les Afro-Américains eux-mêmes. Mais son rôle comme catalyseur culturel pour ouvrir les esprits d'une partie de la jeunesse blanche est indéniable. Il a contribué à éroder les préjugés en montrant la valeur et la puissance d'une culture qui avait été systématiquement dévalorisée.
La conséquence la plus directe et la plus durable du British Blues Boom est sans conteste la naissance et la popularisation du blues rock en tant que genre musical à part entière.
Le British Blues a commencé par une phase d'apprentissage et d'assimilation du blues américain. Les musiciens britanniques étudiaient et reprenaient les classiques de Muddy Waters, Howlin' Wolf ou B.B. King. Mais très vite, ils ont commencé à transformer cette base pour créer quelque chose de radicalement nouveau : le blues rock.
Le blues américain était déjà électrique, surtout le Chicago Blues. Cependant, les Britanniques ont poussé l'amplification à l'extrême. Les groupes ont commencé à utiliser des amplis plus puissants (comme les Marshall, une invention britannique qui est devenue emblématique du son rock) et à expérimenter avec la distorsion, le fuzz et le feedback.
Ce volume et cette saturation accrus ont donné au blues une puissance brute bien plus adaptée aux grandes salles de concert et à l'énergie juvénile de la contre-culture émergente.
Le blues rock a véritablement intronisé le guitar hero. Alors que le blues originel mettait souvent l'accent sur la voix et l'économie des notes, le blues rock a permis aux guitaristes (Clapton, Beck, Page, Green) de devenir des virtuoses flamboyants. Les solos sont devenus plus longs, plus techniques et plus complexes, souvent au cœur de la chanson, et non plus de simples "breaks" instrumentaux. C'était une nouvelle forme d'expression, fusionnant la mélancolie du blues avec l'agressivité du rock.
Les musiciens britanniques étaient également nourris au rock'n'roll de Chuck Berry et Bo Diddley, ainsi qu'au rhythm & blues. Le blues rock a intégré l'énergie rythmique entraînante et les structures de chansons plus directes de ces genres, rendant le blues plus dansant et "rentre-dedans" pour un public plus large.
Initialement axé sur les reprises, le blues rock a rapidement vu l'émergence de compositions originales qui, tout en respectant les structures et les sensibilités du blues, exploraient des thèmes et des sonorités nouvelles.
Des groupes comme Cream (avec Eric Clapton, Jack Bruce et Ginger Baker) ont été des pionniers du power trio blues rock, créant des morceaux originaux d'une intensité inégalée comme "Sunshine of Your Love" ou "Crossroads" (une reprise transformée).
Fleetwood Mac sous la direction de Peter Green, avec des morceaux comme "Black Magic Woman" ou "Oh Well", a montré comment le blues pouvait être à la fois respectueux des racines et innovant dans l'écriture.
L'augmentation du volume, de la distorsion et l'accent mis sur les riffs de guitare lourds ont fait du blues rock le tremplin direct vers le hard rock et le heavy metal.
Led Zeppelin, formé des cendres des Yardbirds (avec Jimmy Page), en est l'exemple le plus flagrant. Leurs premiers albums sont des incarnations parfaites du blues rock, avec des titres comme "Whole Lotta Love" ou "Communication Breakdown" qui sont directement basés sur des riffs blues massifs, mais joués avec une puissance jamais vue. Le groupe a pris le blues, l'a gonflé à bloc et en a fait quelque chose de colossal. D'autres groupes comme Free, Ten Years After, ou plus tard Deep Purple et Black Sabbath, ont également leurs racines dans le blues rock.
En somme, le British Blues n'a pas seulement réinterprété le blues ; il l'a réinventé. Il l'a rendu plus bruyant, plus rapide, plus axé sur la guitare soliste et plus adapté à l'énergie rock'n'roll, créant ainsi un genre qui allait dominer les ondes pendant des décennies et influencer la quasi-totalité du rock moderne.
Le blues et le blues rock traditionnel n'ont absolument pas disparu. Ils se sont simplement faits plus discrets face aux vagues successives du rock, mais ils continuent de prospérer et de produire des artistes d'une grande qualité.
Après la période faste du British Blues Boom des années 60 et l'avènement du psychédélisme, du hard rock, puis du punk et de la new wave, le blues et le blues rock "pur" ont en effet quitté le devant de la scène mainstream. Cependant, ils ont continué de vivre et d'évoluer, soutenus par une communauté fidèle de musiciens et de fans.
Le blues et le blues rock sont retournés à leurs racines, trouvant refuge dans les clubs dédiés, les petits théâtres et, surtout, les festivals de blues et de rock qui ont continué de se développer à travers le monde. Ces festivals sont devenus des lieux essentiels pour découvrir de nouveaux talents et voir des légendes. Le public, moins nombreux que celui de la pop ou du rock mainstream, est en revanche passionné et connaisseur.
L'influence des guitar heroes britanniques des années 60 a inspiré d'innombrables musiciens. Chaque décennie a vu émerger de nouveaux talents qui, tout en s'inspirant des maîtres, ont apporté leur propre touche.
Des artistes comme Stevie Ray Vaughan dans les années 80 ont ramené le blues rock texan sur le devant de la scène internationale avec une énergie et une virtuosité stupéfiantes.
Plus récemment, des figures comme Joe Bonamassa ou Gary Clark Jr. aux États-Unis, ou Kingfish Ingram (également aux États-Unis), montrent la vitalité et la diversité du genre, en mêlant les influences traditionnelles à des sonorités contemporaines.
Les pionniers du British Blues, comme John Mayall, ont maintenu une carrière active pendant des décennies, continuant à tourner et à enregistrer, servant de pont entre les générations.
Même des groupes comme les Rolling Stones reviennent régulièrement à leurs racines blues (notamment avec l'album "Blue & Lonesome"). De son côté, Eric Clapton a régulièrement sorti des albums de blues pur ou de blues rock, prouvant que le genre n'est jamais loin de leurs cœurs.
Le blues et le blues rock d'aujourd'hui sont loin d'être un genre monolithique. On y trouve une grande diversité, du blues acoustique pur au blues électrique lourd, en passant par des fusions avec le jazz, la soul, le funk ou même des éléments plus modernes. Le genre continue d'être une base solide pour l'expérimentation, même si cela se fait souvent dans un cadre respectueux des traditions.
En conclusion, le British Blues Boom a été une explosion majeure qui a catapulté le blues sur la scène mondiale et a donné naissance au blues rock. Mais plutôt que de disparaître, cette flamme a continué de brûler, alimentée par la passion de nouvelles générations de musiciens et d'un public fidèle. Le blues, dans ses formes traditionnelles et rock, reste une force vive et inspirante dans le paysage musical actuel.
● Un immense merci à Florianne pour avoir éclairé le chemin, et à Gemini pour avoir accordé ses cordes, sans qui l'exploration du British Blues Boom n'aurait pas été aussi rock'n'roll et si parfaitement... blues-tastique !

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